Le marché des vins et spiritueux, et celui du luxe de façon plus générale sont des secteurs dans lesquels le packaging joue un rôle essentiel. En termes de répartition, plus de 40% du chiffre d’affaires mondial de l’industrie provient de la France. L’hexagone est en effet baigné d’une culture de luxe (cf. Chanel, Louis Vuitton, etc…), tout comme l’Europe de l’Ouest de façon plus nuancée.
- Un marketing particulier
L’industrie des spiritueux se démarque des produits de grande consommation. Son marketing mix ne se base pas sur les fameux “4 P”, base du marketing depuis maintenant des années, mais sur 5 “P”. A la communication (Promotion), le produit (Product), la distribution (Place) et le prix (Price) s’ajoute le Packaging. Ces 5 variables doivent indéniablement être cohérentes. Ce qui fait la particularité de cette industrie, c’est que le produit n’est pas la variable la plus importante.
Selon Sébastien Dathané (diplômé en M2 Droit, gestion et commerce des spiritueux, fondateur de l’agence DatHa Network), environ 5% des consommateurs de spiritueux sont connaisseurs en la matière. La distribution est en revanche un facteur important (une mauvaise stratégie de distribution peut être fatale, cf. les parfums Bic vendus dans des bureaux de tabac). Le prix est lui aussi une variable importante à maîtriser : lorsque l’on parle de spiritueux, il ne faut pas créer de décalages au niveau de l’image du produit.
Ces différentes variables s’articulent autour du Packaging, qui occupe ainsi une place centrale dans le marketing mix. L’image du produit en dépendra très fortement, et sa fonction pratique sera à privilégier (la forme de la bouteille devra être adaptée afin d’être proposée, stockée dans les bars, et manipulée pour la constitution de cocktails par exemple).
Enfin, et il en est de même pour un grand nombre d’industries, le client reste toujours central. Mais il n’est cependant pas roi : il n’est pas toujours conscient de ses besoins. Il est en constante quête d’évolution, mais pas de ré-volution ; C’est pourquoi c’est aux entreprises et aux designers de savoir rompre avec les codes et proposer des innovation efficaces et pertinentes.
- Un état des lieux du marché mondial
Afin de mieux comprendre le contexte dans lequel évolue l’industrie, voici quelques tendances du marché mondial de boissons alcoolisées .
La bière est une boisson bue partout dans le monde ; il s’agit d’un énorme marché mondial (environ 70% de la consommation mondiale d’alcool). Les vins sont principalement bus dans les pays producteurs de vin, et les spiritueux beaucoup en Asie et en Russie. Globalement, le marché mondial de l’alcool est en bonne santé.
Au niveau de la production mondiale, certaines informations sont également à faire remarquer. Contrairement à ce que nous pouvons penser, le Rhum n’est pas uniquement produit dans la région de Cuba, mais également beaucoup en Inde et en Indonésie, régions où l’on trouve beaucoup de cannes à sucre.
L’Asie est également un gros producteur de spiritueux. Nous ne voyons cependant que très peu d’alcools chinois dans les linéaires européens. C’est ce que l’on peut qualifier d’ « alcool local » : il s’agit d’un alcool produit et consommé dans une certaine zone géographique. Nous connaissons également ce type de phénomène en France, avec le Ricard par exemple, alcool français, dont les consommateurs sont à 80% français. Au contraire, des pays comme l’Amérique du Nord ou l’Europe de l’Ouest produisent beaucoup pour l’International.
Dans certains cas, les marques locales sont fortement valorisées. Nous retrouvons en effet des codes identitaires très différents, en Asie notamment. Certains spiritueux chinois ne ressemblent pas du tout à ce qui se fait en matière de spiritueux en France par exemple. La marque coréenne Jinro est la marque la plus vendue au monde en volume. Ce produit n’est pas disponible à l’international, mais ces chiffres s’expliquent par une très forte consommation locale (corrélée à l’importance de la population Asiatique).
En revanche, concernant les marques internationales, nous remarquons l’importance de la création de valeurs identitaires (des marques, des codes identitaires, etc…). Un fort storytelling est associé aux produits, principalement sur les packagings. Nous retrouvons donc ici le rôle central du packaging dans les stratégies de ces marques (Bacardi, Smirnoff, Absolut, etc…).
- Du standard premium vers le luxe
La notion de « premium » n’implique pas forcément une hausse de la qualité, mais une hausse du prix. La segmentation par les prix est de plus en plus présente. Le mot « premium » est devenu un « fourre-tout », une solution facile pour les marques. Afin de diminuer le risque face à une catégorie de produits qu’il ne connait pas, le consommateur aura comme critère le prix (un prix haut serai serait synonyme de qualité).
La notion de « luxe » est également à éclaircir, puisque l’industrie des spiritueux en fait partie. Nous pouvons distinguer le luxe « inclusif » (le luxe pour les personnes qui ne peuvent pas spécialement se l’offrir tous les jours, c’est un luxe plus accessible) et le luxe « exclusif » (il s’agit au contraire d’un luxe très haut de gamme, et très cher).
Le marché mondial du luxe touche environ 200 millions de personnes en 2011. Cette progression de 8% depuis l’année précédente montre qu’il s’agit d’un secteur qui fait bien plus que résister à la crise. Plus de la moitié du chiffre d’affaires de l’industrie est réalisée par les parfums/cosmétiques et les vins/spiritueux. Il s’agit de domaines dans lesquels le packaging (notamment en verre) est important.
Il est important de nous focaliser à présent sur le consommateur type des produits de luxe. Avant les années 1990, il était aristocrate ou bourgeois. Il côtoyait le luxe au quotidien, était éduqué à ce type de produits. Il s’agit d’une consommation d’appartenance, de recherche de qualité mesurable et de rareté.
Depuis les années 1990, les consommateurs de luxe « traditionnels » que nous venons de décrire diminuent au profit des « nouveaux riches ». Ces derniers ne sont pas éduqués aux produits de luxe, puisqu’ils ne l’ont pas vécu au quotidien. C’est suite à une brusque augmentation de leur capital financier que ce luxe exclusif est devenu accessible. C’est pour eux un moyen d’exhiber leur nouvelle richesse, de rechercher l’exclusivité et ainsi un certain statut social.
Une autre catégorie est à prendre en compte : les « extravagants ». Ils sont plus modérés, mais plus nombreux. Ils recherchent la différence et la nouveauté, en consommant des produits de luxe.
Enfin, les « occasionnels » sont très nombreux, et ont un raisonnement d’avantage « low-cost » sur ce qui n’importe pas trop, pour pouvoir se faire plaisir occasionnellement (achat d’un parfum par exemple). Nous sommes ici face à une consommation de luxe inclusif, qui tend sur du premium.
Il est actuellement pertinent de miser sur les consommateurs « occasionnels » et « extravagants », le « nouveau riche » n’ayant pas de processus d’achat réfléchi, il ne sera pas fidèle. C’est donc à ce niveau que se situe le potentiel du marché.
Il est important de nous intéresser d’ores et déjà aux pays en fort développement (Chine, Indonésie, Asie en général) car leur pouvoir d’achat augmente de façon significative ; il s’agit de marchés à fort potentiel. C’est donc en s’intéressant à leur culture que nous saurons comment leur adresser une offre dans le futur.